Biodiversité

Faune et flore exotiques envahissantes et à fort développement

Mis à jour le | Commissariat général au développement durable

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Les espèces animales et végétales exotiques envahissantes et indigènes à fort développement représentent de véritables menaces pour l’ensemble des écosystèmes humides. Dans le cadre de l’évaluation 2010-2020, les référents ont été amenés à se prononcer sur cette problématique. Au travers de multiples approches (niveau de présence, degré de propagation sur le site entre 2010 et 2020, opérations menées pour limiter l’expansion de ces espèces, raisons pour lesquelles ces actions ont eu lieu), ils ont exprimé leur perception vis-à-vis des pressions qu’ont exercées ces espèces sur le biotope sur la période 2010-2020.

Considérée comme une des causes principales de perte de la diversité du vivant à l’échelle planétaire, l’expansion des espèces exotiques envahissantes, introduites de manière volontaire ou involontaire, constitue un enjeu majeur pour la préservation de la biodiversité. De par son positionnement de carrefour géographique, la diversité de ses climats et milieux naturels, mais également l’importance des flux de marchandises et de personnes sur son territoire, la France est particulièrement concernée par cette problématique. En métropole, près de 1 400 espèces exotiques de flore et plus de 700 espèces exotiques de faune (en outre-mer, près de 400 espèces animales et végétales ont été introduites) sont recensées. Toutes les espèces exotiques n’induisent pas des impacts négatifs. Celles qui sont à l’origine d’impacts importants, directs ou indirects, observés à différents niveaux des territoires, sont considérées comme envahissantes. Ces espèces peuvent affecter la biodiversité indigène (compétition alimentaire, maladies, etc.), le fonctionnement des milieux (changement des propriétés du sol, des plans d’eau et cours d’eau, etc.), la santé humaine (vecteurs de maladie, brûlures cutanée, allergie, etc.), avoir des impacts socio-économiques (perte de production, dégâts sur les infrastructures, etc.) ou encore des répercutions sur la sécurité (collision, etc.). Selon une récente étude française, en 2017, les espèces exotiques envahissantes ont coûté 1 300 milliards de dollars de dommages dans le monde.

De même, les espèces indigènes à fort développement (Sanglier, Grand cormoran, etc.) génèrent également une pression sur les écosystèmes par leur pouvoir de prédation, de compétition pour la nourriture, en modifiant les propriétés du sol, etc. Cette surpopulation est accompagnée très souvent par des impacts indirects qui influent sur l’économie locale (cas de destruction des cultures, piscicultures). De multiples facteurs naturels (climatiques, météorologiques) mais aussi anthropiques (modification de l’habitat, évolution des pratiques agricoles, influence de l’agrainage, etc.) favorisent leur augmentation.

Bien qu’il reste aujourd’hui difficile d’éradiquer ces espèces exotiques envahissantes, de nombreuses actions de prévention et de limitation existent et sont mises en œuvre sur les territoires (arrachages, tirs ciblés, etc.). En lien avec ses engagements internationaux et européens, la France a mis en place un dispositif de lutte contre ces espèces et leurs conséquences sur les écosystèmes.

Des actions sont également mises en œuvre pour réguler les espèces indigènes à fort développement.

14 % des sites humides échappent à la pression des espèces exotiques envahissantes cette dernière décennie

En moyenne, 86 % des sites humides ayant fait l’objet d’une évaluation de la problématique (140 en métropoles et 25 en outre-mer) ont été confrontés aux espèces exotiques envahissantes entre 2010 et 2020. Lors de la précédente campagne 2000-2010, cette proportion était supérieure sur les sites de métropole (97 % des sites couverts contre 88 % en 2020). À l’inverse, les sites ultramarins semblent connaitre une pression croissante puisque seuls 52 % des sites d’outre-mer étaient concernés par cette problématique en 2010 contre 80 % en 2020.

Part des sites humides emblématiques qui ont été concernés par au moins une espèce exotique envahissante entre 2010 et 2020

Alors que les sites de massifs à tourbières semblent avoir été épargnés (seul 42 % des sites concernés) sur la période 2010-2020, les sites de plaines intérieures (100 %) et de vallées alluviales (96 %) ont été particulièrement sujets à cette problématique.

En moyenne, 9 espèces exotiques envahissantes animales et 6 espèces exotiques envahissantes végétales sont présentes sur les sites de métropole (5 en outre-mer) évalués sur cette problématique. Les sites de vallées alluviales et du littoral atlantique, de la Manche et de la mer du Nord sont ceux qui concentrent le plus d’espèces exotiques animales et végétales (10 espèces animales et respectivement 8 et 7 espèces végétales en moyenne). On peut observer une légère tendance à la hausse depuis la précédente campagne puisque 8 espèces animales et 5 espèces végétales étaient recensées.

Nombre moyen d’espèces exotiques envahissantes sur les sites humides emblématiques rencontrées en 2020

En métropole

En métropole, sur les 140 sites évalués sur cette thématique, le marais de Brière, la Somme (amont d’Amiens) et l’Ile d’Oléron sont les sites qui abritent le plus grand nombre d’espèces animales exotiques envahissantes (40 espèces). Les sites de la Loire d’Orléans au Beuvron (32 espèces), Brouage (31 espèces) ou encore de Belledonne et Grandes Rousses (27 espèces) concentrent, eux, le plus grand nombre d’espèces végétales exotiques envahissantes. Bien que minoritaires, 18 sites ne concentrent aucune espèce exotique envahissante.

Leur niveau de présence sur le site a été apprécié au travers de l’étendue. Une espèce peut soit être retrouvée ponctuellement et avoir une faible emprise sur le site (localisée) ou rencontrée de façon diffuse sur l’ensemble du site (très étendue).

Le Ragondin, espèce introduite pour sa fourrure au XIXème siècle en Europe et inscrite sur la liste des organismes nuisibles aux végétaux dont la lutte peut-être rendu obligatoire, est présent sur 98 sites métropolitains. Cette espèce, la plus fréquemment citée, est, dans 52 % des cas, très étendue sur les sites, dans 26 % des cas étendue et seulement 16 % des cas rencontrée de façon localisée. D’autres espèces, telles que l’Écrevisse américaine (69 sites) qui figure sur la liste des espèces exotiques envahissantes préoccupantes pour l’Union européenne, sont présentes majoritairement sur l’ensemble du site (36 % très étendue et 26 % étendue). Le Rat musqué (66 sites) est quant à lui, une espèce retrouvée de façon plus homogène (30 % très étendue, 27 % étendue et 33 % localisée).

Proportion des sites métropolitains concernés par les 20 principales espèces animales exotiques envahissantes en 2020 et leur extension

Interrogés sur le sentiment de prolifération de ces espèces animales entre 2010 et 2020, les référents estiment que la majorité ces espèces animales a régressé sur les sites humides évalués. Une prolifération de l’ensemble ces espèces animales étaient pourtant observée entre 2000 et 2010. Cette tendance semble être le fruit des politiques de lutte contre les espèces exotiques envahissantes menées ces dernières décennies. Seuls le Vison d’Amérique et l’Ouette d’Egypte ont progressé en dix ans. D’autres espèces comme le Silure glane, la Perche-soleil, le Rat surmulot ou encore le Black-bass à grande bouche se sont stabilisées.

Proportion des sites concernés par les 20 principales espèces animales exotiques envahissantes en 2010 et 2020

La Renouée, espèce invasive végétale classée parmi les plus nuisibles au monde, est rencontrée sur de nombreux sites (75), majoritairement de façon localisée (49 % des sites). La Jussie, plante aquatique d’Amérique du Sud, est présente de façon plus diffuse (39 % localisée, 31 % très étendue et 27 % étendue) sur 62 sites. D’autres espèces végétales, comme le Robinier faux-acacia (58 sites), le Buddleja à papillons (44 sites) ou encore l’Erable negundo (41 sites), sont présentes fréquemment et exercent sur les sites métropolitains de l’évaluation une pression sur les écosystèmes.

Proportion des sites métropolitains concernés par les 20 principales espèces végétales exotiques en 2020 et leur extension

Alors que les espèces végétales exotiques envahissantes s’étaient également toutes étendues entre 2000 et 2010, on peut constater une inflexion de cette tendance sur la période 2010-2020. Ainsi, certaines espèces, comme le Robinier faux-acacia ou encore le Buddleja à papillons, sont moins présentes en 2020 qu’elles ne l’étaient en 2010. Les efforts de lutte restent toutefois à poursuivre sur d’autres espèces comme les Solidages et l’Elodée qui continuent leur prolifération. La Renouée, espèce exotique envahissante emblématique des milieux humides, semble avoir été canalisée ces dix dernières années sur les sites de l’évaluation, selon les référents.

Proportion des sites concernés par les principales espèces végétales exotiques envahissantes en 2010 et 2020

En Outre-mer

En Outre-mer, sur les 25 sites évalués sur cette thématique, les lacs du grand Sud (23 espèces), les baies du Carénage et de Prony (14 espèces), les 14 Etangs de Saint Martin et l’étang St Paul (13 espèces) regroupent le plus d’espèces animales susceptibles de menacer le site. La baie de Saint-Vincent (34 espèces), Gouaro-Déva (32 espèces) ou encore les baies du Carénage et de Prony (24 sites) abritent le plus d’espèces végétales. Seuls cinq sites n’ont aucune espèce exotique envahissante : vasière des Badamiers et Baie de Boueni (Mayotte), Basse Mana (Guyane) ou encore l’étang des Salines et les zones humides d’altitude de la caldeira de la Montagne Pelée (Martinique).

Arrivé accidentellement par bateau lors des premières expéditions, le Rat noir est l’espèce la plus citée des sites humides d’Outre-mer (14 sites). Cette espèce est présente localement dans 50 % des cas, de façon très étendue et étendue dans 25 % des cas. Considéré comme une des 100 espèces les plus envahissantes au monde, il est impliqué dans l’extinction et la régression de nombreuses espèces insulaires incluant des oiseaux, des petits mammifères, des reptiles, des invertébrés et des plantes. D’autres espèces, comme la Souris grise et le Rat surmulot, citées fréquemment (9 sites), sont rencontrées de façon locale (respectivement 56 % et 78% des cas).

Proportion des sites ultramarins concernés par les 10 principales espèces animales exotiques en 2020 et leur extension

Le Bringellier marron, espèce envahissante végétale des milieux de la Réunion, est citée le plus fréquemment (5 sites). On retrouve cette espèce de façon localisée dans 40 % des cas ; dans 20 % des cas, elle est présente de façon étendue sur le site. Au même titre que cette espèce, le Faux mimosa, la Jacinthe d’eau ou encore le Tulipier du Japon sont les autres espèces végétales les plus mentionnées. Dans plus de 60 % des cas, ces trois espèces sont présentes localement sur le site.

Proportion des sites ultramarins concernés par les 10 principales espèces végétales exotiques en 2020 et leur extension

Plus d’un site humide emblématique sur deux a abrité des espèces indigènes à fort développement entre 2010 et 2020

Entre 2010 et 2020, 57 % des sites de l’évaluation ont été confrontés à au moins une espèce indigène à fort développement. Les sites de métropole ont été particulièrement concernés par cette problématique (63 % d’entre eux contre 17 % des sites ultramarins).

Part des sites humides emblématiques qui ont été concernés par au moins une espèce indigène à fort développement entre 2010 et 2020 (en%)

En moyenne 2 espèces indigènes animales et 1 espèce indigène végétale sont dénombrées sur les sites en métropole (3 espèces animales et 1 espèce végétale entre 2000 et 2010). Les sites de plaines intérieures sont les sites qui présentent le plus d’espèces alors que ceux de massif à tourbières ou d’outre-mer semblent moins concernés par cette problématique.

Nombre moyen d’espèces indigènes à fort développement sur les sites humides emblématiques rencontrées en 2020

En métropole

Sur les 125 sites de métropole évalués sur cette problématique, 77 ont été confrontés à au moins une espèce au cours de la période 2010-2020. Certains sites sont particulièrement touchés : la Seine de Troyes à l’Aube (11 espèces), la Loire d’Orléans au Beuvron (11 espèces), les Dombes (10 espèces) ou encore le Lac du Der et ses zones environnantes (10 espèces). 48 sites n’ont fait remonter aucune espèce indigène à fort développement.

Le Sanglier, espèce indigène dont les populations ne cessent de croître (809 992 prélèvements sur la campagne 2019-2020, en augmentation de 8,4%) est de loin, l’espèce animale la plus présente sur les sites de l’évaluation (66 sites). D’autres espèces, comme le Grand cormoran dont près de 10 000 couples nicheurs ont été recensés en 2018 ou le Cygne tuberculé, sont retrouvés fréquemment (respectivement 47 et 32 sites). Les référents se sont prononcés sur la présence de ces espèces en 2010 et en 2020. Sur les 7 espèces animales principalement citées, toutes, à l’exception du Cygne tuberculé, ont légèrement régressé sur les sites de l’évaluation en 10 ans.

Les algues sont le groupe de végétaux le plus mentionné (26 sites) devant les autres hydrophytes (15 sites) et les lentilles d’eau (14 sites). Contrairement aux espèces animales, parmi les principales espèces végétales signalées, seules les lentilles d’eau ont régressé.

Proportion des sites concernés par les 7 principales espèces animales indigènes à fort développement en 2010 et 2020
Proportion des sites concernés par les principales espèces végétales indigènes à fort développement en 2010 et 2020

En Outre-mer

Sur les 18 sites ultramarins évalués sur cette problématique, seuls trois sites ont été confrontés à au moins une espèce indigène ces dix dernières années : Crique et Pripri de Yiyi (2 espèces), Vasière des Badamiers (2 espèces), Baies du Carénage et de Prony (1 espèce). Très peu de données ont été renseignées sur cette thématique pour l’outre-mer dans les questionnaires. Une tendance sur ces dix dernières années ne peut donc être dégagée.

Une présence des espèces exotiques envahissantes et indigènes à fort développement qui semble impacter l’état des espèces communes et à forts enjeux

Interrogés pour la première fois sur les espèces communes et à forts enjeux présentes sur les sites humides emblématiques, les référents se sont prononcés sur leur état général (de bon à mauvais). Bien que d’autres facteurs peuvent influer sur l’état de ces espèces (causes anthropiques, problématiques hydrologiques, effets du changement climatique), cette information a été recoupée avec la présence des espèces dites problématiques de métropole (données insuffisantes pour l’outre-mer).

Nota : Afin de mettre en évidence une corrélation entre la présence des espèces dites problématiques (espèces exotiques envahissantes et indigènes à fort développement) le choix a été fait de ne conserver que deux classes (bon état intégrant très bon et bon état et mauvais état intégrant très mauvais état et mauvais état). La modalité ‘ne sais pas’ a été extraite de l’analyse.

Une tendance générale semble se dégager : plus le nombre d’espèces animales et végétales exotiques envahissantes et indigènes à fort développement est élevé sur un territoire, plus la part de sites dont l’état des espèces communes et à forts enjeux est bon tend à diminuer. En effet, lorsque moins de deux espèces animales dites problématiques sont présentes, 74 % des sites ont des espèces animales communes et à forts enjeux en bon état alors que seul 47 % le sont lorsque 13 espèces problématiques ou plus sont présentes. Cette situation est également observée pour les espèces végétales : 67 % des sites ont des espèces communes et à fort enjeux en bon état lorsque moins de deux espèces problématiques végétales sont rencontrées contre seulement 43 % lorsque 11 espèces problématiques ou plus sont hébergées par le site humide.

Part des sites de métropole suivant l’état des espèces animales communes et à forts enjeux et la présence des espèces animales dites problématiques (en %)
Part des sites de métropole suivant l’état des espèces végétales communes et à forts enjeux et la présence des espèces végétales dites problématiques (en %)

Des territoires qui s’organisent pour lutter contre ces espèces

En France, entre 2010 et 2020, 57 % des sites évalués sont intervenus sur les espèces exotiques envahissantes et indigènes à fort développement, ces espèces étant entrées en compétition avec les espèces autochtones. La perturbation directe des écosystèmes et la fermeture du milieu ont constitué la seconde et troisième cause d’intervention (respectivement 50 % et 45 % des sites). Selon les référents, d’autres facteurs sont restées marginaux au cours de cette dernière décennie (collisions automobiles, problèmes sanitaires). Alors que seuls 15 % des sites métropolitains sont intervenus pour limiter l’impact de ces espèces sur les activités de loisirs, cette cause représente la troisième origine d’intervention sur les sites d’outre-mer.

Part des sites humides emblématiques suivant les causes d’intervention qui ont été menées pour limiter l’expansion des espèces dites problématiques entre 2010 et 2020 (en %) (N=164)

Dans le cadre de la Stratégie nationale sur les espèces exotiques envahissantes (objectif 5 - Maîtriser les espèces exotiques envahissantes largement répandues), les plans nationaux de lutte détaillent les différentes actions à mettre en place sur les territoires pour atteindre les objectifs de maîtrise ou d’éradication des populations invasives.
Les espèces indigènes à fort développement font l’objet, elles aussi, de plans de lutte contre la surpopulation passant par une gestion cynégétique adaptée (cas des populations de Sangliers, Grands cormorans, par exemple).

La gestion et la limitation des espèces problématiques animales et végétales sur les sites humides emblématiques au cours de ces dix dernières années se sont concentrées autour de trois axes principaux que sont l’arrachage, le fauchage et le brûlage (67 % des cas), le piégeage et le tir de régulation (59 % des cas) ou encore la battue et la chasse administratives (45 % des cas).

Part des sites humides emblématiques ayant recours à des techniques de gestion ou de limitation des espèces dites problématiques (en %) (N=164)

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